4.01.2013

Alfred Jarry: La Kanzon' de l' Sencerbigado (Chanson du Décervelage)

Kiel vivgajno mi faris meblojn
Kaj mia edzin' modistin' estis.
Ni laboris kaj bredis infanojn
Kaj pace la vivo disvolviĝis.

Dimanĉmatene, plaĉa promenad',
Ĉe la Strat' de la Dolora Sperto
Gaje spektis ni de l'sencerbigad'
La spektaklon – bela mallacigo!

Aŭdu, aŭdu la maŝinon tondri, 
Vidu la cerbon dispremigitan, 
Vidu, vidu la burĝaron tremi; 
Hura, hura! kojonkorno,
Vivu Paĉjo Ubu!

Nia nazmukanta bubetaro
En la ĉarum' stakiĝadis brue,
Ĝis la strato de l'fina ekspiro
Gapulojn serenadis plengorĝe.

L'amaso sur la stratet' svarmadis
Puŝis, mordis por pli bone vidi.
Sur rubaĵmonteto mi staradis
Por ne miajn ŝuojn sangmakuli.

(Rekantaĵo)

Cerberoj ĉirkaŭ ni neĝe falas
La bubaĉaron aplaŭdigante
Kiam la subulaĉ' senkompate
La levilon de la maŝin' premas.

Nu, tuj apud la il' ulo staras,
Kies faŭkon mi tro bone konas.
Fraĉjo, monon al mi ci ja ŝuldas:
Pri cia sorto mi ne responsas.

(Rekantaĵo)

«Pugtrueg', jen la bona momento»,
L’edzino kuraĝigas dolĉvorte,
«Dum sencerbigas l'ekzekutisto
Kontraŭ la fiaĉul' agi venĝe.»

Instigite tiel elokvente,
Mi ekprenas egan bovfekeron
Kaj mian ŝuldantaĉon celante
Trafas malbonvene l'subulaĉon.

(Rekantaĵo)

Al la terurileg' mortdonanta
L'amaso furore min batpelas
Kaj nun 'as mia cerb', kiu neĝas
Sur la naskitar' laŭte ploranta.

Ja danĝeras promeni dimanĉe
Ĝis la Strat' de la Dolora Sperto.
Oni nur volas spektadi distre
Kaj fine fariĝas la spektaklo!

(Rekantaĵo)
Je fus pendant longtemps ouvrier ébéniste,
Dans la ru’ du Champ d’ Mars, d’ la paroiss’ de Toussaints.
Mon épouse exerçait la profession d’ modiste,
Et nous n’avions jamais manqué de rien.

Quand le dimanche s’annonçait sans nuage,
Nous exhibions nos beaux accoutrements
Et nous allions voir le décervelage
Ru’ d’ l’Echaudé, passer un bon moment.

Voyez, voyez la machin’ tourner,
Voyez, voyez la cervelle sauter,
Voyez, voyez les Rentiers trembler ;
(CHOEUR) : Hourra, cornes-au-cul,
Vive le Père Ubu !

Nos deux marmots chéris, barbouillés d’ confitures,
Brandissant avec joi’ des poupins en papier,
Avec nous s’installaient sur le haut d’ la voiture
Et nous roulions gaîment vers l’Echaudé.

On s’ précipite en foule à la barrière,
On s’ fich’ des coups pour être au premier rang ;
Moi je m’ mettais toujours sur un tas d’ pierres
Pour pas salir mes godillots dans l’ sang.

(Refrain)

Bientôt ma femme et moi nous somm’s tout blancs d’ cervelle,
Les marmots en boulottent et tous nous trépignons
En voyant l’ Palotin qui brandit sa lumelle,
Et les blessur’s et les numéros d’ plomb.

Soudain j’ perçois dans l’ coin, près d’ la machine,
La gueul’ d’un bonz’ qui n’ m’ revient qu’à moitié.
Mon vieux, que j’ dis, je reconnais ta bobine,
Tu m’as volé, c’est pas moi qui t’ plaindrai.

(Refrain)

Soudain j’ me sens tirer la manch’ par mon épouse :
Espèc’ d’andouill’, qu’ell’ m’dit, v’là l’moment d’te montrer :
Flanque-lui par la gueule un bon gros paquet d’ bouse,
V’là l’ Palotin qu’a just’ le dos tourné.

En entendant ce raisonn’ ment superbe,
J’attrap’ sus l’ coup mon courage à deux mains :
J’ flanque au Rentier une gigantesque merdre
Qui s’aplatit sur l’ nez du Palotin.

(Refrain)

Aussitôt suis lancé par-dessus la barrière,
Par la foule en fureur je me vois bousculé
Et j’ suis précipité la tête la première
Dans l’grand trou noir d’ous qu’on n’ revient jamais.

Voilà c’ que c’est qu’ d’aller s’ prom’ ner l’ dimanche
Rue d’ l’Echaudé pour voir décerveler,
Marcher l’ Pinc’-Porc ou bien l’ Démanch’-Comanche,
On part vivant et l’on revient tudé.

(Refrain)

Tradukis: Stéphane Brault
Originalmuziko

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